Views: 0
Charles Pigeard (1818-1885) foi oficial da marinha francesa. Chegou a «Lieutenant de vaisseau» em 1846, capitaine de frégate em 1855 e a capitaine de vaisseau em 1861. Enter 1863 e 1864 foi adido militar na Embaixada França em Londres. Foi cavaleiro (1844), oficial (1857) e comandante (1866) da Légion d’Honneur. Foi autor de «diversos trabalhos hidrográficos e de numerosas publicações sobre a marinha e as colónias». Ver https://bit.ly/3P7fZe9.
Em 1879 publica o segundo tomo de uma compilação de trabalhos seus intitulada «Mélanges» e que inclui, entre eles, o «Étude historique et géographique sur l’archipel des Açores», elaborado originalmente em 1847, pequena obra bem feita e que revela bem a admiração com que ficou pelos Açores e pelos açorianos.
Transcrição (quase) completa:
«Troisième Partie
Étude historique & Géographique sur l’Archipel des Açores (1847)
Appelé à passer plusieurs mois aux îles Açores, en 1846 et 1847, nous avons consacré nos loisirs à réunir, par l’intermédiaire de quelques personnes obligeantes, les documents les plus récents sur l’histoire et sur la géographie de cet archipel. Excepté les ouvrages de Cordeiro et de Gaspar Fructuoso, publiés tous deux au XVIIe siècle, nous n’avions pour nous aider dans ce travail, d’autres documents écrits que des fragments incomplets et contradictoires, qu’il eut été imprudent de consulter aveuglément, parce qu’ils portaient tous un caractère plus ou moins frappant d’ignorance ou de partialité. Nous avons, pour cette raison, tenu à n’employer, comme bases de cette étude, que des renseignements soigneusement contrôlés, aimant mieux la restreindre à de moindres proportions, en restant exact, que de l’étendre aux dépens de la vérité.
I – Exposé général
Les neuf îles de Sainte-Marie, Saint-Michel, Tercère, Saint-Georges, Gracieuse, le Pic, Payai, Flores et Corvo, qui composent l’archipel des Açores, sont comprises entre les 37° et 40° degrés de latitude septentrionale, et les 27° et 33° degrés de longitude occidentale; elles doivent probablement leur nom au grand nombre d’oiseaux du nom d’açor (autour), que les premiers navigateurs rencontrèrent sur leurs rivages, à l’époque de la découverte, et que l’on y aperçoit encore aujourd’hui. Leur formation a donné lieu à tant de controverses parmi les géologues, qu’il ne nous appartient guère de hasarder des idées personnelles à ce sujet. Nous nous bornerons à consigner ici les quelques traditions courantes, en laissant aux hommes spéciaux le soin d’adopter, en dernière analyse, l’opinion qui mérite la préférence. Selon quelques auteurs modernes, les Açores seraient les débris de la fameuse île Atlantide, à laquelle Aristote, Strabon, Platon, Diodore de Sicile, etc., assignaient les dimensions d’un continent dans une antiquité reculée, et qu’ils disaient avoir été submergée dans une grande convulsion du globe. Ces assertions, bien qu’admissibles à quelques égards, rencontrent aujourd’hui peu de croyance et sont, à tort ou à raison, reléguées par le plus grand nombre, dans le domaine des rêveries.
Hadson, Patrin, Leibnitz et quelques autres pensent qu’elles sont les cimes de montagnes primitives de la terre, dont la chaîne aurait uni les Cordillères du nouveau monde aux Alpes de l’ancien. Les raisons invoquées à l’appui de cette opinion par le docte Gaspard Fructuoso, dont les travaux sont recommandables à tant d’autres titres, ne se discutent pas. Il prétend que si les Açores n’avaient pas dans le principe été liées au continent de l’Europe, elles seraient forcément aujourd’hui suspendues entre l’air et l’eau, et ne pourraient s’y maintenir; il ajoute, à l’appui de ce système, qu’en faisant route de l’archipel au Portugal, les navigateurs vont toujours reconnaître la roche de Cintra (1), parce que chaque partie tend naturellement vers son tout. Nous ne nous arrêterons pas à réfuter de semblables arguments ; il faut les mettre au rang de celui de Galilée, expliquant l’ascension de l’eau dans un corps de pompe par l’horreur que la nature a du vide.
(1) Roche de Cintra, sur la côte de Portugal.
Cook, Swedenbourg et Goulard pensent, avec plus d’apparence de raison, que les Açores sont le produit de convulsions volcaniques sous-marines. Depuis leur découverte, en effet, des îlots s’y sont élevés spontanément à diverses époques, pour disparaître plus ou moins longtemps après ; des cratères s’y sont formés et éteints, d’autres sont encore en ignition sur quelques montagnes; partout, en un mot, le géologue y rencontre les traces d’une grande activité volcanique. Il faut ajouter, cependant, que cette théorie est démentie, sur quelques points de l’archipel, par la présence de la pierre calcaire.
Nous ne pousserons pas plus loin l’énumération des systèmes édifiés à ce sujet. Tous laissent quelque chose à désirer, comme on le voit, et comme on s’en convaincra davantage dans la suite de cette notice.
La découverte des Açores paraît remonter au commencement du XVe siècle. Selon le Père Cordeiro, l’infant don Pedro de Portugal rapporta, en 1428, d’un voyage qu’il fit dans les divers Etats de l’Europe, une carte sur laquelle se trouvaient indiqués les contours connus du globe, et entre autres points remarquables, le détroit de Magellan, le cap de Bonne-Espérance, les côtes d’Afrique et des terres vagues dans l’ouest. C’était, on le sait, dès le XIIIe siècle, une croyance populaire qu’il existait à l’occident de l’Europe une grande région que les géographes, sans pouvoir en indiquer la forme, ni les dimensions, nommaient Antilia. Les esprits, avides de merveilleux, rêvaient avec ténacité la découverte de cette terre imaginaire, qu’ils se représentaient abondante en toute sorte de richesses, et, par leur persistance dans une heureuse erreur, contribuaieint à hâter la connaissance de la vérité.
Quoi qu’il en soit, vers 1431, sous le règne de Jean Ier, l’infant don Henrique, ce prince auquel le Portugal a du ses plus brillantes découvertes, équipa un navire et donna pour unique instruction à un gentilhomme de sa cour l’ordre de se diriger vers l’ouest jusqu’à la rencontre de la terre. Gonçalo Velho Cabrai — c’était son nom — atteignit en peu de jours les îlots les Fourmis, rochers arides situés à 20 milles dans le N.-N.-E. de l’île Sainte-Marie, dont il n’eut pas connaissance, et, sans pousser plus loin son voyage, il retourna en Portugal, fort inquiet de l’accueil que lui ferait don Henrique.
Celui-ci, loin de se rebuter, vit dans ce premier résultat une nouvelle présomption en faveur de ses idées ; et Gonçalo, expédié de nouveau, découvrit cette fois la grande île qui fut nommée Sainte-Marie. Elle était inhabitée et dépourvue de ports; mais le sol en paraissait d’excellente qualité, des ruisseaux la sillonnaient en tous sens, et le climat y était délicieux. Gonçalo en fut nommé capitaine donataire, et s’occupa aussitôt de pourvoir à sa population. Bon nombre de ses parents et amis, appartenant presque tous aux conseils du roi, raccompagnèrent, et bientôt l’ile fut en bonne voie de prospérité.
[…]
II – Divisions géographique & politique
L’archipel des Açores compte environ 110 lieues de l’est à l’ouest, et 50 du nord au sud ; il forme trois départements :
Celui de Ponta-Delgada, qui comprend:
– Saint-Michel
– et Ste-Marie.
Celui d’Angra:
– Tercère,
– Saint-George
– et Gracieuse.
Celui de Fayal:
– Fayal,
– Le Pic,
– Flores
– et Corvo.
Sa position sous les plus belles latitudes de la zone européenne, lui donne un climat doux, sain et agréable. Les grandes brises de l’Océan septentrional y tempèrent la chaleur des jours d’été, et de hautes montagnes y offrent toutes les expositions favorables à une grande variété de cultures. Si l’on excepte les sommets de l’île du Pic qui restent couverts de neige pendant quatre mois de l’année, jamais l’hiver ne fait ici sentir ses rigueurs, et les autres saisons y sont toujours délicieuses.
De la mer, l’aspect général est tour à tour sauvage, gai et grandiose : des rochers gigantesques profilent sur le ciel bleu leurs cimes déchiquetées, qui couronnent des montagnes verdoyantes ; sur le littoral s’étalent des villes et des villages aux maisons blanches et riantes ; de toutes parts, des églises et d’anciens couvents poussent vers le ciel leurs clochetons gracieux ; çà et là une cascade bondit au flanc d’un promontoire sombre, et vient mêler son écume à celle de la lame qui gronde sourdement dans un dédale de roches noires, aux pointes acérées et dangereuses.
Pour le promeneur, le panorama n’est pas moins pittoresque et imposant : ici, il parcourt une vallée ombreuse, au fond de laquelle serpente un ruisseau d’eau vive, dont les chutes animent des moulins, tandis que les collines qui l’encaissent sont peuplées de bestiaux et couvertes de céréales ou d’orangers; là, il suit un chemin rocailleux et perfide qui longe une falaise escarpée, au-dessus de laquelle pendent de gros rochers gris, prêts à se détacher et à emporter tout dans leur chute, tandis qu’à ses pieds la mer rugit et paraît vouloir se frayer un passage dans des cavernes mystérieuses.
Partout le paysage pénètre le voyageur d’un secret sentiment d’admiration et de crainte, en déployant tour à tour à ses yeux les tableaux sublimes, gais ou mélancoliques que la nature se plaît à répandre dans ses œuvres de prédilection.
Pourquoi la nature, si prodigue à tant d’égards envers les Açores, leur a-t-elle refusé de bons ports, et a-t-elle rendu leurs approches si dangereuses? Il n’y a point dans l’Océan Atlantique de parages plus admirablement situés pour servir de lieu de relâche aux marins, après de longues et périlleuses navigations, quand souvent les vivres leur manquent ou qu’ils ont essuyé des avaries ; et s’ils pouvaient y trouver un refuge sûr et commode, combien de sinistres seraient épargnés à l’humanité !
Quand nous parlerons de chaque île en particulier, nous reviendrons sur cette question qui intéresse au plus haut degré toutes les nations maritimes, à une époque où l’on voit des ports artificiels parfaitement abrités se créer comme par enchantement sur les côtes les plus dangereuses.
Le temps n’est plus où des éruptions volcaniques venaient fréquemment modifier la configuration de ces îles ; celles qui ont encore lieu de loin en loin ne causent que peu ou point de dommages, et depuis l’année 1775, un seul tremblement de terre a occasionné quelques désastres dans l’île de Tercère. Toutefois ces convulsions, jointes à l’apparition momentanée de petits îlots, dont nous aurons l’occasion de parler, aident à expliquer le phénomène que l’on constate ici comme sur plusieurs autres points du globe, tels que la Suède, le Chili : nous voulons parler de l’abaissement apparent du niveau de la mer qui tient, on le sait, à un mouvement imperceptible de soulèvement de la croûte terrestre.
On a découvert dans les montagnes plusieurs sources d’eau thermales et divers minéraux utiles; mais rien n’a confirmé jusqu’ici l’opinion émise par quelques voyageurs qu’on y trouvait de l’or et des diamants.
Le sol, qui est généralement d’une grande fertilité, est formé d’une argile ferrugineuse recouverte tantôt de terre végétale, tantôt de scories et de cendres volcaniques. Docile à toutes les cultures, il demande bien peu de travaux pour récompenser largement le laboureur de ses peines, et en tout temps ses productions furent dues à ses qualités plutôt qu’à l’art. L’agriculture est florissante à St-Michel, à Gracieuse et à Fayal; les autres îles cultivent particulièrement la vigne qui exige ici peu de soins. On trouve dans diverses parties de l’archipel la plupart des végétaux de la zone torride à côté de ceux de la zone tempérée; quelques-uns de ces derniers acquièrent même des qualités inconnues dans ceux de l’Europe. Les plantes médicinales abondent partout, et les forêts fournissent d’excellents bois pour les constructions, notamment le cèdre.
On cultivait encore sur une grande échelle aux Açores, il y a quelques années, une plante nommée pastel, dont la feuille réduite en poudre, après avoir été séchée au soleil, donnait une belle teinture bleue. Cette industrie est aujourd’hui abandonnée à cause de l’impossibilité de la faire entrer en concurrence sur les marchés avec celle de l’indigo ; il en est de même de la culture de la canne à sucre et du tabac, dont les produits, inférieurs à ceux d’Amérique, ne trouvent pas de débouchés.
Le gros bétail prospère dans toutes les îles, et les habitants, même les moins aisés, comptent une ou deux vaches dans leur étable et quelques porcs dans leur cour. La chair de ce dernier animal est de bonne qualité, et constitue, avec les légumes secs et la pomme de terre, la principale nourriture des gens pauvres. Les chèvres sont assez rares, malgré la nature accidentée du terrain qui semblerait devoir favoriser leur multiplication, et la race chevaline n’a pas atteint le degré de prospérité que semblent promettre les nombreux pâturages qu’elle rencontre à chaque pas. La cause en doit probablement être attribuée au mauvais état des chemins et aux avantages que présente le gros bétail pour la culture des terres et pour certains travaux de force.
Tous les menus gibiers sont abondants, notamment la caille, la bécasse, le ramier et le lapin de garenne.
Il est, en somme, peu de lieux civilisés où la vie ordinaire soit moins dispendieuse et meilleure que dans la plupart de ces îles, tant y sont grandes les facilités de faire pulluler les végétaux et les animaux les plus utiles à l’homme.
Nous ne saurions assigner un chiffre exact à la population des Açores, à cause du peu de soin qu’on apporte aux recensements. On nous a assuré qu’on ne s’éloignait guère de la vérité en l’estimant entre 200 et 210 mille habitants.
Les hommes sont, à peu d’exception près, de taille moyenne, maigres et élancés ; leurs traits sont réguliers et profondément accentués; leur teint est brun, quelquefois animé de teintes vermeilles sur les joues, ils sont intelligents, sociables et hospitaliers. Les femmes sont généralement jolies; quelques-unes même fort belles ; elles ont malheureusement, surtout dans les classes inférieures, peu de soins de leur toilette, et perdent ainsi la plupart de leurs avantages.
On rencontre encore, notamment dans les grandes îles, bon nombre de descendants de l’ancienne noblesse qui a fourni à l’archipel ses premiers colons : ils passent pour être très-infatués de leur origine, sans faire toujours ce qu’ils devraient pour s’en montrer dignes.
La classe moyenne est laborieuse, sobre et peu soucieuse en général de ses intérêts politiques, excepté cependant celle de Saint-Michel, qui, plus nombreuse et plus rapprochée du pouvoir, prend une part active et quelquefois énergique aux agitations de la métropole.
Chaque année, un grand nombre de navires baleiniers américains fréquentent l’archipel pour y prendre des rafraîchissements, qui sont abondants et à bon marché, et pour recruter des matelots parmi les pécheurs, tous excellents marins. Les jeunes gens pauvres s’embarquent volontiers, et, après avoir couru le monde pendant cinq ou six années, reviennent au foyer paternel, avec le fruit de leurs économies, aider leurs parents âgés ou se créer à eux-mêmes une famille. Ces habitudes de migration sont la conséquence naturelle du bas prix de la main-d’œuvre, qui met, aux Açores, le pauvre dans l’impossibilité presque absolue d’arriver jamais, par son travail, à être au-dessus du besoin; elles sont aussi occasionnées par la crainte du recrutement militaire. Si elles enlèvent quelques bras à la terre, elles ont le bon côté de répandre un peu de bien-être dans les classes nécessiteuses.
Le paysan seul a conservé son costume national, qui consiste en une veste de grosse étoffe de laine fabriquée dans le pays, un pantalon semblable ou de grosse toile, suivant la saison, et une sorte de bonnet en drap, muni d’appendices latéraux qui se déploient pour garantir le cou de la pluie ; la main est armée d’un gros bâton de quatre pieds, qui aide la marche dans les chemins escarpés.
Le costume des femmes ne présente rien de particulier, si ce n’est un vaste manteau en drap bleu ou noir qui descend jusqu’à terre et les fait ressembler de loin à des capucins.
La langue universelle des Açores est le portugais, que les gens aisés parlent assez purement, mais qu’il est difficile à un étranger de comprendre dans la bouche de ceux du peuple.
La religion, à l’exclusion de toute autre, est la catholique; elle a pour chef spirituel un évêque qui résidait autrefois à Tercère, et dont le siège est actuellement à Saint-Michel, bien que le chapitre n’ait pas cessé de rester dans la première de ces deux îles. Avant la loi du 17 mai 1832, qui supprima les couvents, il n’y avait île, si petite qu’elle fût, qui n’en comptât deux ou trois; ils étaient pour la plupart occupés par des moines franciscains, et par des jésuites (avant 1755). C’étaient en général des repaires de débauche, de fanatisme et d’ignorance. Nous passerons sous silence les faits scandaleux relatifs à cette époque; mais nous devons à la vérité de dire que la majeure partie des prêtres aujourd’hui répandus dans l’archipel donne un coupable exemple de dissolution, en vivant presque publiquement en concubinage.
Le gouvernement est exercé par trois gouverneurs civils ou préfets, indépendants les uns des autres, qui siègent aux chefs-lieux des trois départements, et qui sont nommés par la couronne. Chaque ville a, de plus, un administrateur du Conseil, sorte de maire, qui relève du gouverneur civil du département, et, chaque paroisse, un délégué qui relève de l’administrateur de la ville voisine. Le Conseil est une municipalité, choisie parmi les habitants notables pour éclairer les décisions de l’autorité.
Les préfets ont à leur disposition une petite force militaire, commandée par un général, qui réside à Saint-Michel et qui a sous ses ordres deux commandants de subdivision chargés, dans les autres départements, de pourvoir à la garnison des divers points fortifiés. Le chiffre total des troupes n’excède pas mille hommes, tant d’infanterie que d’artillerie. Cette petite force suffit à occuper les principaux points militaires et à maintenir l’ordre ; elle n’aurait besoin, en cas de guerre, que d’être triplée pour assurer la garde des points importants de l’archipel, que des écueils nombreux mettent presque partout à l’abri d’un coup de main.
Au temps des capitaines généraux, chaque île avait sa milice nationale, composée de citoyens et commandée par des officiers du gouvernement ; mais, en 1832, cette institution fit place à celle de la garde nationale, qui est promptement tombée en désuétude. Il en est des fortifications comme de la garde nationale : leur longue inutilité les a fait négliger, et, sur beaucoup de points, elles sont dans un état pitoyable; les affûts pourris ou brisés, et les pièces gisent sans surveillance sur la terre, exposés à toutes les intempéries.
La marine portugaise n’a pas un seul bâtiment aux Açores, pas même une chaloupe pontée ; aussi n’est-il pas rare de voir, pendant l’hiver, toute communication interrompue, durant 2 et 3 mois, entre certaines îles et le chef-lieu de leur département.
La justice réside entre les mains de neuf juges de première instance répartis dans les principales villes de l’archipel. Chacun d’eux prononce en dernier ressort sur les causes d’une importance ordinaire, et soumet ses décisions à une junte supérieure qui siège à Saint-Michel, pour toutes les causes d’un ordre élevé.
L’instruction est dans de mauvaises conditions : trois cours publics de philosophie et de rhétorique et deux collèges servent à répandre l’instruction parmi la jeunesse aisée des îles. Ces établissements manquent des éléments nécessaires à de bonnes études, et le plus souvent c’est en Europe que les enfants sont envoyés, quand leurs parents tiennent à ce qu’ils soient à la hauteur des connaissances actuelles. Il y a, dans les villes de quelque importance, des écoles gratuites où l’on enseigne à lire et à écrire, ainsi que les éléments du latin; mais les maîtres qui les dirigent sont si peu surveillés et rétribués, qu’ils ne prennent aucune peine pour former des élèves, et l’on peut avancer, d’après les supputations les plus modérées, qu’il y a au plus un enfant sur 30 sachant lire et écrire.
Les arts utiles n’ont fait aux Açores que bien peu de progrès. Une manufacture de draps, établie à Saint-Michel, a quelque temps rivalisé par ses produits avec celles du continent; elle est aujourd’hui abandonnée, et les seules étoffes qui se fabriquent dans les îles sont des tissus grossiers de laine, quelques toiles de lin ouvragées qui ne sont pas sans mérite, et des couvertures de coton communes. Tel est, avec la fabrication du vin, de l’eau-de-vie, de la grosse poterie et du fromage, le fond de l’industrie manufacturière. Le commerce principal avec l’extérieur consiste dans l’exportation des oranges, qui sont délicieuses, des vins, des légumes secs et des céréales. Les îles font de plus, entre elles, un petit commerce de cabotage, pour échanger ceux de leurs produits qui ne peuvent être exportés : ce sont les étoffes de laine, les tuiles, la poterie commune, la chaux, etc. Le commerce des vins a beaucoup diminué et ne s’élève guère à plus de la moitié de ce qu’il était il y a quarante ans. La cause en est due à l’augmentation du prix de la main-d’œuvre et de celui des terres, et au long état de paix qui a permis aux autres vins de l’Europe d’entrer en concurrence. L’eau-de-vie aussi était autrefois un article important de commerce ; mais elle ne s’exporte plus aujourd’hui qu’en petite quantité, comme le vin.
Le Portugal et l’Angleterre sont les deux pays qui entretiennent le plus de relations avec les Açores : le premier absorbe presque toutes ses céréales, le second y envoie chaque année 200 navires prendre des oranges. Ce mouvement considérable a fait réunir dans plusieurs ports des moyens efficaces de réparation et de ravitaillement. Angra et Horta sont notamment pourvus de bois de mâtures, de cordages et de tout ce qui est nécessaire aux navires dans leurs relâches. Le dernier se recommande particulièrement, ainsi que nous le verrons plus loin, par les ressources nombreuses qu’il présente aux navigateurs.
Le revenu total des îles s’élève à un peu plus de 2 millions; il est fourni par les droits de douane et de timbre, par les taxes sur le sel, le tabac, etc., et par la dîme. La dîme, composée de la dixième partie des récoltes de blé, vin, oranges, etc., est ordinairement affermée à l’enchère, dans chaque ile, pour un certain nombre d’années.
Les appointements de tous les employés, sans distinction, sont payés sur ces revenus et le trésor de la métropole reçoit l’excédant, qui varie de 4 à 500,000 francs.
On s’étonne, avec quelque raison, qu’une population de 200,000 âmes procure d’aussi faibles revenus à l’Etat. Cette situation, qui ne date pas de plus de 20 années, reconnaît pour causes principales l’incurie du gouvernement et le commerce interlope considérable qui se fait sur les cotes au préjudice de la douane.
III Résumé Historique
Ainsi que nous l’avons dit en commençant, la première des Açores fut découverte en 1432 par Gonçalo Velho Cabrai; la reconnaissance complète de l’archipel ne s’acheva qu’en 1460. Toutes furent trouvées couvertes d’une riche végétation, mais sans aucun être vivant autre que des oiseaux. Leur sol était tellement encombré d’arbres, qu’il était impossible de pénétrer à l’intérieur, et de nombreux cours d’eau les arrosaient. Ouvertes à l’ambition de l’Europe, à une époque où ses divers Etats étaient en proie à la guerre, ces terres nouvelles donnaient à leurs possesseurs des espérances qui se réalisèrent effectivement en peu d’années. Les progrès de la population y furent dès l’origine considérables; de diverses parties de l’Europe on y voyait accourir des émigrants qu’attirait la réputation de fertilité du sol, et en moins d’un siècle elles fournissaient déjà des habitants aux autres possessions portugaises du nouveau monde. Elles furent divisées d’abord en sept capitaineries, héréditaires dans quelques familles de haute noblesse. Les donataires percevaient le dixième de tous les produits, et réunissaient les pouvoirs militaire, civil et judiciaire. C’était la féodalité moins ses rigueurs; car l’histoire constate que la bonne harmonie des premiers habitants, la candeur de leurs coutumes, l’intégrité qui présidait à l’administration de la justice, les grands avantages qu’on tirait de l’agriculture et du commerce, alors entièrement libre, invitaient beaucoup de gens à abandonner leur pays inquiet et tourmenté, pour chercher cette nouvelle patrie si productive et si pacifique.
Ce ne fut qu’après bien des années que le gouvernement annula les privilèges qu’il avait octroyés aux Açores, et les réunit à la couronne.
Bien que l’histoire de ces îles n’offre point les scènes sanglantes et désastreuses qui signalèrent la conquête d’une grande partie du nouveau monde, elle n’en a pas moins eu aussi ses phases malheureuses. Il se passa bien longtemps avant qu’un prince sincèrement ami de ses peuples s’occupât d’elles. On ne se rappelait guère leur existence que pour les accabler de prohibitions injustes; mais ce fut surtout en 1580, quand la couronne de Portugal passa sur la tête des rois d’Espagne, qu’elles eurent à souffrir, par suite de la résistance énergique qu’elles opposèrent à Philippe II pendant près de trois années. Le roi portugais, vaincu, se réfugia alors à Angra, capitale de Tercère, où il établit sa cour, et sut si bien se concilier l’esprit des populations, qu’en peu de temps elles formaient une armée aguerrie, avec laquelle il repoussa successivement les deux expéditions dirigées d’Espagne contre lui. En 1583, cependant, accablé par des forces très-supérieures, il se vit obligé d’abandonner Angra et de fuir vers la France, en laissant l’archipel au pouvoir de ses ennemis.
Sous la domination des Espagnols, plus tyrannique que celle des Portugais, les Açores ne laissèrent pas cependant de prospérer : de magnifiques fortifications garantirent les points vulnérables des attaques extérieures et rendirent la plupart des ports inexpugnables; des établissements publics, des églises, des couvents, des casernes s’élevèrent de toutes parts; des chemins furent pratiqués; il est, en un mot, peu de travaux considérables de ces temps reculés qui ne soient le témoignage des efforts que fit l’Espagne pour donner du lustre à sa conquête.
Lors de l’avénement de don Joao de Bragance au trône du Portugal, l’archipel eut encore une lutte violente à soutenir, pour secouer le joug de l’Espagne, qui occupait toutes les places importantes. Durant deux années, ses enfants combattirent avec un indomptable courage, et ils finirent par faire capituler leurs ennemis. Le roi reconnut cette haute preuve d’attachement, en donnant place, sur le premier banc des Cortès, au député de l’archipel; mais, soit ignorance, soit maladresse, celui-ci ne crut pouvoir utiliser mieux son crédit, qu’en faisant supprimer aux Açores les représentants de l’autorité centrale. Privées dès lors d’un lien direct avec la mère-patrie, exploitées sans mesure par les municipalités, elles virent tarir une à une les sources de leurs richesses, et furent accablées de charges tellement lourdes, que l’excédant de leurs céréales ne put même être envoyé en Portugal.
Ce fut sur ces entrefaites qu’arriva au pouvoir le célèbre marquis de Pombal, ce ministre qui, pendant une longue période d’années, sut si bien faire respecter son pays par toutes les nations, et lui rendit l’éclat dont il avait brillé dans ses meilleurs jours. Un des premiers actes de son ministère fut d’envoyer aux Açores un délégué du pouvoir royal, investi du titre de capitaine général, et de les ériger en province du Royaume. Une succession non interrompue de ministres mit malheureusement fin à ce retour de faveur, et elles retombèrent dans la catégorie des colonies.
Angra, depuis cette époque, est restée la capitale de l’archipel et le lieu de résidence de tous les grands pouvoirs.
La guerre du Portugal avec la France, en 1807, ne s’étendit pas aux Açores, et, débarrassées d’une foule d’entraves commerciales que leur avait imposées jusque-là la métropole, livrées à elles-mêmes, elles virent tous leurs produits augmenter de valeur, et leurs vins, très-recherchés par l’Angleterre, atteindre des prix élevés. Bien qu’exposées alors de temps à autres aux dévastations des corsaires, et malgré la perte de quelques navires richement chargés, cette époque leur procura une prospérité qu’elles ne connaîtront probablement plus.
Le changement de résidence de la cour de Lisbonne à Rio-Janeiro, tout en apportant aux Açores quelques avantages, entraîna aussi pour elles des maux sérieux : les impôts devinrent plus durs, les recrutements plus arbitraires, et divers actes du gouvernement prirent un caractère attentatoire à la propriété comme à la liberté des citoyens.
Les choses se trouvaient dans cet état quand, en 1821, le poste de capitaine général fut confié au général Stockler, homme d’un grand savoir et d’antécédents distingués, mais d’une humeur capricieuse et hautaine. Il n’y eut de toutes parts, sous son gouvernement, qu’un cri pour déplorer le despotisme militaire sous lequel on était accablé. Ponta-Delgada, capitale de l’île Saint-Michel, la plus riche et la plus populeuse du groupe, se souleva la première contre ce régime d’oppression. Elle déposa le délégué du capitaine général, qui résidait dans son sein, et se donna un gouvernement provisoire. Bientôt Stockler lui-même fut déposé à Angra, et toutes les villes, successivement, imitèrent l’exemple de Ponta-Delgada et d’Angra.
Depuis cette époque, l’archipel, divisé en trois départements, dont chacun est administré par un gouverneur civil ou préfet, comme nous l’avons dit ailleurs, envoie aux Cortès huit députés : trois pour le département de Ponta-Delgada, trois pour celui d’Angra et deux pour celui de Fayal. Chacune des îles, suivant le chiffre de sa population, figure au collège électoral de son département pour un certain nombre d’électeurs choisis parmi les notables.
L’histoire des Açores, à partir de 1821, se lie essentiellement, quant aux événements politiques, à celle de la mère-patrie. En 1828, après la révolution d’Oporto, à la suite de laquelle don Miguel, régent du royaume, usurpa la couronne, quelques milliers de Portugais se réfugièrent à Plymouth, et vinrent de là à Tercère, d’où, sous la conduite du comte de Villa-Florès, ils conquirent les autres îles à la cause de don Pedro.
Depuis lors, l’archipel a pris une part fort tiède aux dissensions qui ont agité la métropole, et il lui est fréquemment arrivé de témoigner sur ce point une complète indifférence. Toutefois, il est à remarquer que le département de Ponta-Delgada a généralement marché en tète des idées libérales, tandis que celui d’Angra restait fidèlement le défenseur de la royauté, et que le département d’Horta s’abstenait de toute démonstration.
IV Tableaux de la Population & du Commerce
Topographie de l’Archipel
Les deux tableaux qui suivent présentent, l’un, les chiffres des populations absolue et relative de chaque île; l’autre, l’ensemble du commerce d’importation et d’exportation de l’archipel. Nous ne pouvons les donner comme rigoureusement exacts, bien qu’ils nous aient coûté quelque peine à dresser, à cause du peu de concordance des documents dont nous disposions; mais on ne s’éloignera guère de la vérité en les adoptant.
1er Tableau. — Population.
2e Tableau. — Commerce.
Nous avons maintenant à entrer dans quelques détails sur chacun des trois départements dans lesquels se divise l’archipel, et qui empruntent respectivement leurs noms aux villes où résident les préfets : Ponta-Delgada, Angra et Horta.
Département de Ponta-Delgada.
Le département de Ponta-Delgada comprend les deux îles de Saint-Michel et de Sainte-Marie; c’est le moins étendu des trois, mais en même temps le mieux cultivé et le plus riche ; son revenu s’élève à un million de francs, dont une portion va au département d’Angra, pour l’aider à subvenir à ses dépenses, et près de 300,000 fr. au trésor de Lisbonne.
L’île de Saint-Michel, située à environ 250 lieues dans l’ouest du Portugal, fut découverte le 8 mai 1444, jour de la Saint- Michel. Elle a 12 lieues de longueur, et 70,000 habitants répartis dans une grande ville, Ponta-Delgada; cinq petites, Ribeira-Grande, Villa-Franca, Alagoa, Aguadepau, Nordeste; et 21 bourgades, plus ou moins considérables.
L’intérieur de l’île est accidenté de montagnes peu élevées ; le climat y est sain, quoique un peu humide, comme celui de tout l’archipel ; le sol, d’une grande fertilité, emprunte un aspect agréable à la grande variété des cultures. Les bestiaux de toute espèce sont abondants, particulièrement les ânes, qui servent au transport des fruits et des marchandises, et rendent presque tous les services que l’on demande ailleurs aux bœufs. Le bon état des chemins et la supériorité du mouvement commercial, n’ont pas peu contribué, dans le département do Ponta-Delgada, à la multiplication de cette race, qui pourrait également prospérer dans les autres îles, et dont la nature patiente s’adapte parfaitement à ce sol tourmenté.
St-Michel est, de toutes les Açores, celle dont les annales offrent le plus d’exemples de convulsions volcaniques. L’éruption qui eut lieu en 1444, dans l’intervalle du second au troisième voyage de Gonçalo, fut surtout terrible et changea si complètement l’aspect de l’île, que ce navigateur la reconnut à peine à son retour. Cette catastrophe détermina à Sette-Cidades un affaissement considérable de terrain, où se formèrent deux grands lacs et de vastes plaines qui attirent l’attention du voyageur. L’éruption de Villa-Franca, en 1522, qui eut également des suites désastreuses, rasa la ville et en prolongea l’emplacement à grande distance dans la mer, en engloutissant près de 4,000 personnes. Diverses autres éruptions, plus ou moins dévastatrices, eurent lieu dans les années 1563 et 1652, et enfin celles de 1719 et de 1811 furent suivies de l’apparition de quelques îlots qui s’engloutirent peu de temps après.
On rencontre à Saint-Michel des sources d’eaux thermales salutaires contre les maladies de la peau. Les plus renommées sont celles de la vallée das Furnas, dont on raconte des effets merveilleux et qui sont sulfurées-acidules.
Malgré les avantages attachés à sa position, et malgré l’industrie de ses habitants, il est douteux que cette île atteigne jamais le degré de prospérité qui lui semble assigné, à cause du peu de sécurité qu’offrent ses ports. Il arrive fréquemment aux navires qui se présentent pendant l’hiver sur son littoral, pour prendre des chargements d’oranges, d’être forcés, avant de compléter leur fret, de gagner le large, par suite des mauvais temps. Durant cet éloignement obligatoire, la portion de chargement embarquée s’avarie aussi bien que celle restée à terre, et il en résulte des pertes considérables pour l’acheteur comme pour le vendeur.
Il y a trois siècles, qu’à plusieurs reprises, le gouvernement a été supplié de créer un port à Saint-Michel, et chaque fois il a repoussé, ou éludé les demandes qui lui étaient faites. En 1819, les habitants ont offert de contribuer pour un tiers à la construction d’un bassin, et même de le construire entièrement à leurs frais, sous condition de percevoir un droit; mais toutes leurs démarches sont restées sans résultats. Enfin, en 1842, le gouvernement s’est décidé à entreprendre quelques travaux pour améliorer une petite darse située à Ponta- Delgada, et qui peut recevoir une dizaine de navires ; mais ce n’est point là un abri sûr, et, dans la mauvaise saison, les bâtiments sont constamment en danger de dérader ou de se jeter à la côte, à moins que l’état du temps ne permette de leur porter des secours en ancres, chaloupes, amarres, etc.
Les récoltes de maïs, de légumes secs et de céréales, s’élèvent, à Saint-Michel, à 25,000 muids, dont on exporte environ le tiers, et à plus de 100,000 caisses d’oranges qui prennent, chaque année, la route de l’Angleterre. Ainsi qu’il a été dit ailleurs, on cultivait autrefois à Saint-Michel, la canne à sucre, le pastel et le tabac; mais ces industries sont aujourd’hui abandonnées.
Ponta-Delgada, la capitale de l’île, qui fut fondée en 1499, s’étend le long de la côte S. de Saint-Michel sur un terrain peu accidenté et dans une grande baie mal fermée. La supériorité de ses ressources lui a valu d’être la résidence de l’évêque, de la junte suprême de justice et du commandant militaire de tout l’archipel, qui, dans le principe, résidaient toujours à Angra. Plusieurs édifices, parmi lesquels on remarque la douane, l’hôpital de la Miséricorde, d’anciens couvents et quelques belles églises décorent cette ville. Ses établissements littéraires consistent en une bibliothèque publique récemment ouverte, en une chaire de philosophie et de rhétorique, et en quelques écoles primaires. Trois forts la défendent du côté de la mer et en rendent, avec les rochers qui hérissent le rivage, l’approche difficile. C’est à Ponta-Delgada que se fait le principal commerce, tant d’importation que d’exportation, des Açores, et que les autres îles s’alimentent de produits étrangers. Les faubourgs abondent en villas élégantes qui appartiennent aux riches négociants de la localité, et de vastes bouquets d’orangers donnent en toute saison à la campagne des environs un aspect vert et riant. La population de Ponta-Delgada, estimée à 10,000 âmes, est laborieuse, remuante et jalouse de sa supériorité numérique.
Ribeira-Grande, ville de 8,000 âmes, est située dans une jolie plaine, sur la côte N. de l’île et presque au milieu de sa longueur. Une rivière qui la traverse et se jette à la mer lui a donné son nom : c’est là qu’était sur l’archipel des Açores. autrefois la fabrique do draps dont il a été question au commencement de cette notice. On y remarque quelques jolies maisons et une belle église. Son port est principalement défendu par des récifs et par un petit fort en mauvais état.
Villa-Franca, la plus ancienne ville dos Açores, celle qui a eu tant à souffrir de l’éruption de 1852, s’élève à quatre lieues dans l’E. de Ponta-Delgada. Son port, complètement ouvert depuis l’E. jusqu’au S.-O., est cependant un des moins mauvais de l’île, et se prêterait plus aisément peut-être que celui de la capitale, à des travaux hydrauliques. Elle compte 4,000 habitants.
Alagoa, bâtie entre Villa-Franca et Ponta-Delgada, ne mérite aucune mention spéciale, non plus que Nordeste ni Aguadepau. Parmi les vingt et une bourgades qui complètent la population de Saint-Michel, on cite Rabo do peixe, avec 4,000 habitants; Mosteiros, dont le port est assez bon; Valle-das-Furnas, renommé par ses eaux minérales et situé sur l’emplacement d’un cratère aujourd’hui éteint; enfin Setto-Citades, dont il a été dit quelques mots précédemment.
Le nombre des navires qui fréquentent Saint-Michel, varie annuellement de 300 à 350 : l’Angleterre entre pour 130 ou 150 dans ce chiffre, les Açores et le Portugal pour à peu près autant, et les autres nations pour le reste. L’île de Sainte-Marie, la plus E. de l’archipel, est à 14 lieues environ dans le S.-S.-E. de Saint-Michel : ce fut la première découverte et habitée; elle a trois lieues de l’E. à l’O., et son rivage est bordé presque sans interruption de rochers dangereux. Plus qu’aucune autre, cette île présente des témoignages à l’appui de l’opinion qui rattache tout ou partie de l’archipel des Açores à un ancien continent : on n’y trouve pas de trace d’action volcanique, et la pierre calcaire s’y rencontre en certaine quantité. La principale industrie de sa population, qui n’excède pas 7,500 habitants, consiste dans la culture des céréales et des légumes, dont plus de 300 muids s’exportent sur Lisbonne et sur Madère, dans la confection des tuiles et de la grosse poterie, dont elle approvisionne tout l’archipel, et dans la fabrication de la chaux. On a, depuis quelques années, essayé d’y naturaliser l’oranger, qui a parfaitement réussi, et qui donnera probablement, avant longtemps, son contingent au commerce de l’île. Les descendants de Gonçalo Velho Cabrai furent successivement, après lui, donataires de Sainte-Marie, jusqu’à l’époque où le duc de Bragança, en montant sur le tronc de Portugal, arracha cette île à son possesseur, Joao Soares d’Albergaria, en châtiment de son dévouement à lu cause de l’Espagne. Depuis cette époque, sa prospérité a considérablement diminué, et il est douteux qu’elle redevienne jamais ce qu’elle a été. On compte à Sainte-Marie une petite ville, Porto, et trois bourgades.
Porto, le premier point habité des Açores, est une ville de 2,000 habitants, qui n’offre rien de particulier. Bâtie dans le S.-O. de l’ile, sur le versant d’une colline qui vient finir à la mer, elle n’a qu’un mauvais port ouvert aux vents d’O. et mal défendu. Santo-Spirito, Santa-Barbara, San-Pedro sont les trois bourgades principales, dont dépendent quelques paroisses sans importance.
L’écueil des Fourmis, sentinelle avancée des Açores, est un groupe de rochers insignifiants, bons seulement à abriter de loin en loin une barque de pécheur. Toutefois, ils conservent cet intérêt historique que ce furent les premières terres aperçues par Gonçalo Velho Cabrai, lorsqu’il partit en découverte, en 1431.
Département d’Angra.
Le département d’Angra comprend les îles Tercère, Saint-George et Gracieuse. La totalité de sa population s’élève à 72,000 âmes; ses revenus sont de 5 à 600,000 francs, qui ne peuvent suffire, comme nous l’avons déjà dit, à couvrir ses dépenses.
L’île de Tercère, située par 29° 33′ de longitude O. et 38° 44′ de latitude N., doit son nom à son rang de découverte, qui fut le troisième. Son sol est fertile, mais moins bien cultivé que celui des autres îles, et ne produit pas autant qu’autrefois. On compte à Tercère 39,000 habitants, parmi lesquels bon nombre de familles nobles descendant des premiers colons qui peuplèrent l’archipel. Cette circonstance, due à la présence constante dans l’île du délégué de la couronne, l’a tenue fermement attachée à la royauté, et nous avons vu, dans les considérations générales qui commencent cette notice, avec quelle fidélité et quel brillant courage elle combattit pour le trône. On peut lui reprocher de s’être trop souvent isolée du reste do l’archipel, quand il s’agissait d’en soutenir les intérêts généraux; mais cette attitude était, nous le répétons, due à l’influence exercée par les grands pouvoirs qui y résidaient, plus qu’à l’opinion des habitants.
On trouve dans cette île plus de luxe et moins d’industrie que dans les autres Açores. Le commerce y est peu considérable, et l’importation, supérieure à l’exportation, se limite à 6,000 muids de céréales et 24,000 caisses d’oranges. Le vin qu’on y fabrique ne suffit pas à la consommation de ses habitants, qui, chaque année, en demandent une certaine quantité à Graciosa et à Fayal. Le voisinage des villes est embelli par de jolies maisons de plaisance, mais nulle part la campagne n’offre l’aspect animé qui frappe à Saint-Michel.
La population de Tercèro se répartit dans une grande ville, Angra, deux petites, Praya et Sao-Sebastiao, et quinze bourgades.
Angra, avec 12,000 habitants, est située sur la côte S. de l’île, au fond d’une baie assez bien protégée de la mer, depuis le S. jusqu’à l’E., et où peuvent s’abriter contre certains vents de nombreux navires. Le port est pourvu de tout ce qui est nécessaire aux navigateurs en relâche, et deviendrait aisément sûr moyennant quelques constructions qui le fermeraient au S.-E., seule direction d’où la mer soit réellement à craindre. C’était autrefois le point de relâche des flottes portugaises revenant de l’Asie, de l’Afrique et de l’Amérique.
Les belles fortifications qui défendent Angra et qui se développent sur le mont Brasil, le grand nombre de ses églises et de ses édifices publics lui donnent un caractère sévère et grandiose, dont la disposition des lieux ne permet malheureusement pas de jouir du large. C’est la ville la plus considérable de l’archipel, après Ponta-Delgada.
Praya, bâtie près de la pointe E. de l’île, sur une plage de sable, compte 3,000 habitants; elle fut entièrement détruite, en 1842, par un tremblement de terre et réédifiée comme par enchantement, grâce aux efforts du gouverneur civil, Silvestre Ribeira. Il y avait autrefois, dans son voisinage, de riches salines, aujourd’hui abandonnées.
Sao-Sebastiao, petite ville de 1,200 habitants, était, il y a un demi-siècle, le centre d’un commerce assez considérable de tabac et de pastel.
Les bourgades les plus considérables sont Villa-Nova et Santa-Barbara.
L’île de Saint-George, située à 9 lieues dans l’O. de Tercère, a la forme d’une langue de terre étroite, et s’étend du N.-O. au S.-E. sur une longueur de 9 lieues. Elle est bordée de rochers élevés, taillés à pic, qui la défendent contre toute attaque et en rendent l’approche dangereuse pour les bâtiments. Sa position centrale dans l’archipel la désignerait, de préférence à Tercère, pour le siège du gouvernement.
Des volcans ont détruit une grande partie du terrain cultivable de Saint-George. L’éruption de 1580, en particulier, la couvrit dans presque toute son étendue d’un déluge de scories et de ponces, et changea en pierres ses belles campagnes; celle de 1808, moins désastreuse, ne laissa pas d’y causer aussi de grands ravages. Malgré sa déchéance, elle fournit encore un élément important au commerce général des Açores, notamment d’excellentes céréales, de bons fruits, de l’eau-de-vie, du vin qui passe, avec celui du Pic, pour le meilleur de l’archipel, des étoffes de lin et de laine, et des fromages de bonne qualité.
Découverte la quatrième, le jour anniversaire du martyre de Saint-George, elle fut, dès cette époque, annexée à la capitainerie d’Angra, et n’eut jamais, comme les autres Açores, l’avantage de posséder son donataire dans son sein. Sa population, d’environ 22,000 habitants, est répartie dans les petites villes de Vellas, Calheta et Topo, et dans sept bourgades.
Vellas est bâtie en amphithéâtre sur les flancs d’une montagne, auprès d’une grande baie, à 2 lieues au S.-E. de la pointe O. et compte 4,500 habitants. Son port, assez bien défendu par l’art du côté de la mer, mais ouvert aux vents de S.-E., qui y entrent avec violence par l’étroit canal formé entre Saint-George et le Pic, est abrité des autres vents par le voisinage meme de cette dernière île et de Fayal. On trouve, auprès de la pointe E., une petite crique avec un quai, où un certain nombre de navires de fort tonnage peuvent accoster.
Calheta, avec 2,000 habitants, s’élève dans une plaine limitée d’un côté par la mer et de l’autre par de hautes montagnes. Son anse étroite n’est fréquentée que par des embarcations.
Lopo, au S.-E. de l’île, fut le premier point de Saint-George habité; sa population est de 2,800 âmes.
Les principales bourgades sont Norte-Grande, Ribeira-Secca et Urzelina, où l’on cultive des raisins excellents.
L’ile de Gracieuse, à 10 lieues au N.-O. de Tercère et à 7 au N.-N.-E. de Saint-George, peut avoir 4 lieues d’étendue du N.-O. au S.-E. Les rivages en sont bas, mais l’intérieur est accidenté et montagneux. Ses principales productions sont l’orge, qui réussit mieux que dans les autres îles, et le vin qui, quoique de qualité inférieure, fournit une eau-de-vie estimée. Découverte la cinquième, par des pécheurs de Tercère, en 1451, elle fut, comme les autres Açores, l’apanage de quelques familles nobles, jusqu’en 1650, époque où elle fut réunie à la couronne.
Des corsaires algériens ont, à plusieurs reprises, ravagé son littoral, mais elle n’a jamais traversé les vicissitudes dont ses voisines furent le théâtre.
On estime la population de Gracieuse à 11,500 habitants, répartis dans les deux petites villes de Santa-Cruz et de Praya, et dans deux bourgades.
Santa-Cruz compte 3,000 âmes et Praya 2,000. Le nom et un chiffre sont tout ce que l’on peut mentionner de ces localités, qui n’offrent rien de particulier.
Département d’Horta.
Ce département qui emprunte, comme les autres, son nom à sa capitale, comprend les quatre îles de Fayal, le Pic, Flores et Corvo. Sa population est de 74,000 âmes, et ses revenus de 500,000 francs, dont une petite partie revient au Trésor de l’Etat.
L’île de Fayal, qui compte 27,000 âmes, est aujourd’hui la plus intéressante des Açores. Son port, Horta, l’un des moins mauvais de l’archipel, est fréquenté par beaucoup de navires étrangers qui y trouvent de nombreuses ressources. On y construit d’excellentes embarcations et de petits navires; de jolis meubles sortent de ses ateliers; l’agriculture y est aussi florissante que dans les belles provinces de Portugal; enfin, ses habitants ont contracté, par leur frottement fréquent avec les étrangers, des coutumes et des goûts qui font de Payai une île à part, et qui n’ont pas peu contribué à la prospérité dont elle jouit. Séparée par un étroit canal de l’île du Pic, où se récolte la presque totalité des vins do l’archipel, et qui est dépourvue do ports, Fayal est devenue l’entrepôt naturel de sa voisine. La plus grande partie do son commerce se fait avec Hambourg, les Etats-Unis, l’Angleterre et les autres Açores, dans les proportions suivantes de navires :
Angleterre: 35
Açores: 86
Hambourg, etc.: 40
A ces 161 navires, il faut ajouter près do 200 baleiniers américains qui viennent annuellement se ravitailler à Horta, et qui y laissent tous une plus ou moins grande quantité de marchandises.
D’après le père Cordeiro, Fayal fut découverte en 1453 par des pêcheurs do l’île Saint-George; la famille de George d’Hurta en fut donataire jusqu’en 1G92.
Une éruption, qui eut lieu en 1672 et qui enleva à l’île des terres précieuses, est la seule dont on ait le souvenir.
On compte à Fayal une ville, Horta, et neuf bourgades.
Horta s’étale en amphithéâtre au fond d’une vaste haie de sable, qui offre le meilleur mouillage des Açores. Protégée contre presque tous les vents par la terre et par le voisinage de l’ile du Pic, cette baie est cependant ouverte à celui du S.-E., qui y occasionne une grosse mer et y cause souvent des dommages. Quelques brise-lames en auraient bientôt fait un port excellent, où les navigateurs rencontreraient à la fois un abri sûr et de nombreux approvisionnements. Tel qu’il est aujourd’hui, le port d’Horta se recommande à l’attention particulière des marins par les ressources variées qu’il présente : des corps-morts, récemment établis par une compagnie anglaise, leur assurent des ancrages passables ; ils y trouvent de bons ouvriers, des bois, des rechanges et toutes sortes do rafraîchissements; enfin, le passage mensuel d’un bateau à vapeur transatlantique garantit leur correspondance.
Bien qu’une des plus intéressantes des Açores et méritant à juste titre toute l’attention du gouvernement, la ville d’Horta est à peine défendue contre une attaque extérieure. Son aspect, du large, est celui d’une grande ville. On y remarque de jolies églises, de vastes casernes et des maisons de campagne d’un excellent goût. Sa population est de 8,000 habitants.
Flamengos, Cedros et Castello-Branco sont les trois bourgades les plus importantes de l’île.
En terminant ces quelques lignes sur Fayal, nous devons parler d’une baie de sable peu fréquentée, située à très-petite distance au sud de celle d’Horta, dont elle n’est séparée que par un isthme de 150 pas environ, et nommée Porto-Pim. Ce mouillage pourrait être rendu excellent et parfaitement sûr à peu de frais ; une roche qui s’élève à l’entrée servirait de base aux travaux nécessaires pour le fermer et le mettre à l’abri de la houle du sud, la seule qui y soit à craindre.
L’île du Pic est située tout à côté et dans le S.-E. de celle de Fayal; elle s’étend vers l’E.-S.-E. sur une longueur d’environ 8 lieues et sur une largeur variable de 2 à 3. Son littoral, hérissé de hautes roches volcaniques, est complètement dépourvu de ports. Une chaîne de montagnes, dans la partie ouest de laquelle on remarque un pic fort élevé qui a donné son nom à l’île, la divise dans sa longueur. Le sommet de ce pic, couvert de neige pendant quatre mois de l’année, se termine par un vaste cratère complètement éteint, qui a plus de 120 mètres de largeur sur 30 de profondeur.
La grande élévation de cette montagne permet de la voir de fort loin quand le ciel est clair, et d’apprécier, par l’état des nuages accumulés au sommet, la nature du temps à venir.
Les traces d’éruption volcanique sont nombreuses dans l’île du Pic, et toutes ses parties sont autant de monuments d’un travail sous-marin. Aussi le sol en est-il généralement pierreux et particulièrement propre à la culture de la vigne, excepté dans la partie E., où l’on a naturalisé avec succès les produits d’Europe. La récolte annuelle peut s’estimer à 2,000 muids de céréales et à 20,000 pipes de vin généralement bon. Toutefois, hâtons-nous d’ajouter que des brouillards fréquents rendent cette évaluation sujette à de nombreuses variations.
Les habitants de l’île du Pic ont la réputation d’être, entre tous ceux des Açores, les plus adonnés au travail, et ses pécheurs, obligés de braver une côte presque toujours dangereuse, sont d’intrépides marins, qui fournissent annuellement une portion notable du contingent que les îles apportent à la pêche de la baleine à bord des navires américains.
On fabrique au Pic une grande quantité d’étoffes communes de lin et de laine, et si une manufacture régulière de draps avait à s’établir dans l’archipel, la bonne qualité de la laine qui se récolte dans cette île devrait lui valoir la préférence. Ainsi que nous l’avons dit, presque tout son commerce se fait par le port d’Horta.
Découverte en même temps que l’île de Payai, celle du Pic a eu dans l’origine le même donataire, et a passé comme elle entre les mains de la couronne en 1692. Son histoire n’offre rien qui ne se rattache essentielement à celle de sa voisine, dont on doit la considérer comme partie intégrante. Les 33,000 habitants du Pic sont répartis dans trois petites villes : Lages, Magdalena, Sao-Roque, et dans quatorze bourgades.
Lages est située au sud de File, dans une plaine limitée au nord par des rochers; sa population est de 3,000 âmes.
Madalena fait face à Horta, dont elle n’est éloignée que de 4 milles. Son voisinage produit d’excellent vin.
Sao-Roque n’a rien de remarquable.
Punta da Piedade et Santo-Antonio sont les deux bourgades les plus considérables.
L’île de Flores, la plus occidentale de l’archipel, a 3 lieues d’étendue du nord au sud et 2 de l’est à l’ouest. On y rencontre partout des vestiges de volcans, des cônes de soulèvement, de la lave, des pierres poreuses, etc. Son littoral est bordé de falaises escarpées et de roches menaçantes, qui le rendent presque inabordable. L’intérieur est très-accidenté, montagneux, et n’a pas, en général, l’aspect riant des autres Açores; le climat y est aussi plus froid et plus humide, et, malgré les habitudes laborieuses de sa population, on n’y constate pas autant d’aisance. L’isolement de Flores du reste de l’archipel et sa rare fréquentation par les étrangers, sont les principales causes de cette infériorité. Ses productions consistent en céréales, pommes de terre et ignames. Ce dernier légume, dont un grand nombre de cours d’eau favorise le développement, constitue le fond de la nourriture des classes inférieures. On trouve, à l’intérieur, de bons bois de construction, particulièrement le cèdre, qui a, on le sait, la propriété de résister indéfiniment à l’action de l’humidité. Il n’est pas rare de rencontrer, à de grandes profondeurs sous terre, des troncs de cet arbre dont l’écorce est entièrement brûlée, tandis que le bois est dans un parfait état de conservation, autre indice d’anciennes convulsions volcaniques dans cette île.
Flores exporte aux îles voisines des bestiaux, un peu de grain et de viande salée, des tuiles, quelques bois, des étoffes de laine communes, réputées de bonne qualité, et une grande quantité de couvertures assez appréciées. Reléguée avec Corvo à 6O lieues du centre de l’archipel et à 35 du chef-lieu de son département, elle n’a que de rares communications avec le reste des Açores et encore moins avec l’Europe. Ses habitants, dont le gouvernement métropolitain a toujours semblé ignorer l’existence, sont, entre tous ceux de l’archipel, recommandables par la simplicité de leurs mœurs, leur cordialité et les dispositions naturelles qu’ils montrent pour les travaux de l’intelligence. La situation même de leur île les a constamment tenus étrangers aux discordes de la métropole, et n’a pas peu contribué à conserver parmi eux ce caractère loyal et hospitalier qui est leur plus précieuse qualité.
La population de Flores, estimée à 12,800 habitants, est répartie dans deux petites villes, Santa-Cruz et Lagens, dans quatre bourgades et quelques petits villages.
Santa-Cruz, la capitale, est bâtie auprès de la mer, sur un plateau d’environ 25 mètres d’élévation, sorte de pâté de lave recouvert successivement de cendres, de matières végétales et animales, et qui est aujourd’hui d’une grande fertilité. L’ancrage, mal abrité et dépourvu de fortifications, n’est guère fréquenté que par des baleiniers, qui viennent y prendre des rafraîchissements, et par quelques navires rentrant de l’Inde ou de l’Amérique en Europe. Cette île est, en effet, celle de toutes les Açores que les navigateurs peuvent le plus facilement atteindre sans se déranger de leur route, quand ils effectuent leur retour. Quelques travaux peu dispendieux suffiraient pour y créer, au milieu des rochers qui avoisinent Santa-Cruz, un abri capable de recevoir une dizaine de navires, et Flores, selon toute probabilité, en acquerrait une importance notable en peu d’années. Population : 2,O00 âmes.
Lagens est bâtie dans le S.-E. de l’île ; c’est une très-petite ville, que fréquentent aussi les baleiniers.
Les deux bourgades les plus importantes sont Punta-Delgada et Lazazinha [Fajãzinha].
La petite île de Corvo, située à 3 lieues dans le N.-N.-E. de Flores, peut avoir 3 milles du N. au S. et 2 de l’E. à l’O. Tout son littoral est bordé de falaises abruptes d’une hauteur prodigieuse. Le sol en est montagneux et fertile. On remarque au sommet un lac dont il a été question au commencement de cette notice et qui occupe la place d’un ancien cratère. L’ile n’a que depuis 20 ans cessé d’être la proie d’un donataire, qui y percevait des impôts onéreux. Elle dépend aujourd’hui de Flores, sous les rapports administratif, judiciaire et religieux. Quoique bien rapprochés l’un de l’autre, il n’est pas rare de voir, dans la saison d’hiver, ces points rester un et deux mois sans pouvoir communiquer entre eux, à cause des mauvais temps qui règnent alors constamment dans ces parages.
La population de Corvo, estimée à 800 habitants, a, plus encore que celle de sa voisine, conservé une simplicité de mœurs dignes des premiers âges de la découverte. Elle est laborieuse, sobre, parfaitement unie, complètement indifférente aux jouissances du luxe européen, et vit heureuse, ne formant, pour ainsi dire, qu’une seule famille dont le curé est le père.
Résumé
Comme on le voit par les quelques pages qui précèdent, l’archipel des Açores, si intéressant pour le voyageur et le géographe, ne l’est pas moins pour l’économiste.
Le climat en est sain et tempéré; la population laborieuse, sobre et profondément honnête.
Toutes les cultures susceptibles de donner la richesse y réussissent parfaitement.
Comme lieu de relâche, il présente aux nations maritimes des avantages incomparables de position, et il ne lui manque, pour atteindre à une grande prospérité, que quelques bons ports.
On ne saurait, quand on a vu de près et étudié ce point privilégié du globe, s’empêcher de former des vœux pour que ces avantages lui soient bientôt assurés.
C.P. (1847).»
Like
Comment
Share